​​Victor Clavelly

novembre 2020

Les Créatures Orphelines

Victor Clavelly s’amuse à déformer les corps, les métamorphoser, les rendre puissants, chétifs, animaux, par le dessin puis par le vêtement ; il en change l’essence même en abordant la silhouette comme des prolongements et ou des prothèses de ces corps nouveaux. Sa pratique de la mode est donc celle d’un médium libre où le patronage est considérablement affûté par l’usage et la maîtrise des outils numériques de conception, lui donnant la possibilité d’une grande expérimentation formelle. Il développe ainsi des motifs appliqués à la manière d’un trompe l’œil digital, des silhouettes hybridées poussées aux limites d’une allure, d’une posture irréelle et déploie avec une grande dextérité la sculpture de corps augmentés : l’ensemble invente une collection, un vestiaire extraterrestre d’une grande complexité plastique et technique.

Texte

Mathieu Buard

Temple Magazine

Comment construis-tu tes silhouettes ?

Victor Clavelly

Je commence par dessiner, mon trait n’est pas très droit, frêle. Je pense une silhouette en contours que je vais ensuite modéliser en 3D, une fois que le volume me plait je vais y ajouter les détails. Toutes mes silhouettes sont pensées par la matière, la couleur puis le vêtement. C’est hyper fastidieux de construire un vêtement, c’est la phase où je suis le plus mauvais. La finition est quelque chose que je n’aime pas faire, mes vêtements sont souvent très mal finis.

Temple Magazine

Le vêtement vient habiller tes personnages. Quelles ont été les inspirations pour ta collection Les Créatures Orphelines ?

Victor Clavelly

Je l’ai développée pendant le premier confinement de mars, je sortais de mois d’écriture de mon mémoire qui parle notamment des corps artificiels dans la peinture, la sculpture ou la fiction. Comment ces corps artificiels sont annihilés, s’émancipent de leur créateur ? en reliant ces questions aux silhouettes de mode qui sont des prothèses artificielles d’un corps. J’ai récupéré tous les archétypes de corps artificiels, toutes ces figures de pantins, de poupées, de chimères comme le monstre de Frankenstein ou Pinocchio. Le nom de ma collection vient de ces recherches, ces corps se confrontent à la piqure du créateur, à cette figure paternelle.

Aussi pendant cette période de confinement, j’ai beaucoup joué aux jeux vidéo (Dark souls III, Bloudborn), et au jeu de rôle Donjons et Dragons. Ces univers d’héroïques fantaisies ont nourri l’iconographie médiévale et chevaleresque présente dans mes personnages. Une de mes silhouettes est mon personnage de Donjons et Dragons d’ailleurs. J’y passais plusieurs heures, ça prenait tout son sens de le matérialiser ainsi, en vivant par procuration à travers mon orc pyromancienne.

Temple Magazine

Comment intervient cette référence des jeux vidéo au-delà de tes personnages ? Est-ce que tu développes un univers autour ?

Victor Clavelly

Ma première collection, dessinée en licence de mode, était basée sur la chambre de sauvegarde. Cet endroit dans le jeu vidéo où on vient se réfugier, ce moment de pause. Cette coupure du monde que peut apporter le jeu, me procure un refuge, un lieu où je me sens bien. En ce moment je travaille sur un univers pour mes chimères numériques en 3D, que je puisse vraiment être immergé dedans, les animer et jouer. À terme j’aimerais développer un showroom immersif, pousser jusqu’au bout l’univers de mes collections, que ce soit une expérience sensationnelle qui ne soit pas figée.

Temple Magazine

Idéalement, c’est par cette plateforme numérique mise en place que tu souhaiterais présenter ta collection ? Par un ajout de couches immersives et interactives ?

Victor Clavelly

Oui, et en ce moment les showrooms numériques sont une des meilleures alternatives. La mode se montre numériquement ce qui remet en question notre façon de la créer et de la commercialiser.

Temple Magazine

Ce qui est intéressant dans ta collection c’est que ce choix d’un défilé numérique n’est pas fait par défaut suite à la crise sanitaire, c’est intrinsèque à ton processus de création.

Victor Clavelly

Cette année je prends le temps de finaliser ce projet d’univers plus global, je ne veux pas que ça entre dans le flux des viewing room qu’il y a actuellement. J’ai envie de m’éloigner de ces normes-là, de construire quelque chose de nouveau qui apporte dans cette mouvance.

Le choix des outils numériques est inhérent à ma pratique. En arrivant à Duperré, je ne savais pas construire des patrons de vêtements, la 3D m’a aidé à réaliser mes formes. Aujourd’hui en tant que jeune créateur j’ai du mal à me projeter dans un futur. À quoi je sers ? En utilisant ce type de procédé j’essaie de repenser la façon de faire du vêtement. Pendant mes stages dans de grandes entreprises j’ai halluciné en voyant le nombre de personne sur une collection, le temps nécessaire, le nombre de prototype. Tout est lent et ne me semble plus cohérent avec la manière de produire aujourd’hui. Le système archaïque et monarchique de certaines maisons de mode me sidère. Je n’arrive pas du tout à me projeter dans ce type de système.

 

Temple Magazine

Comment construis-tu tes silhouettes ?

Victor Clavelly

Je commence par dessiner, mon trait n’est pas très droit, frêle. Je pense une silhouette en contours que je vais ensuite modéliser en 3D, une fois que le volume me plait je vais y ajouter les détails. Toutes mes silhouettes sont pensées par la matière, la couleur puis le vêtement. C’est hyper fastidieux de construire un vêtement, c’est la phase où je suis le plus mauvais. La finition est quelque chose que je n’aime pas faire, mes vêtements sont souvent très mal finis.

Temple Magazine

Le vêtement vient habiller tes personnages. Quelles ont été les inspirations pour ta collection Les Créatures Orphelines ?

Victor Clavelly

Je l’ai développée pendant le premier confinement de mars, je sortais de mois d’écriture de mon mémoire qui parle notamment des corps artificiels dans la peinture, la sculpture ou la fiction. Comment ces corps artificiels sont annihilés, s’émancipent de leur créateur ? en reliant ces questions aux silhouettes de mode qui sont des prothèses artificielles d’un corps. J’ai récupéré tous les archétypes de corps artificiels, toutes ces figures de pantins, de poupées, de chimères comme le monstre de Frankenstein ou Pinocchio. Le nom de ma collection vient de ces recherches, ces corps se confrontent à la piqure du créateur, à cette figure paternelle.

Aussi pendant cette période de confinement, j’ai beaucoup joué aux jeux vidéo (Dark souls III, Bloudborn), et au jeu de rôle Donjons et Dragons. Ces univers d’héroïques fantaisies ont nourri l’iconographie médiévale et chevaleresque présente dans mes personnages. Une de mes silhouettes est mon personnage de Donjons et Dragons d’ailleurs. J’y passais plusieurs heures, ça prenait tout son sens de le matérialiser ainsi, en vivant par procuration à travers mon orc pyromancienne.

Temple Magazine

Comment intervient cette référence des jeux vidéo au-delà de tes personnages ? Est-ce que tu développes un univers autour ?

Victor Clavelly

Ma première collection, dessinée en licence de mode, était basée sur la chambre de sauvegarde. Cet endroit dans le jeu vidéo où on vient se réfugier, ce moment de pause. Cette coupure du monde que peut apporter le jeu, me procure un refuge, un lieu où je me sens bien. En ce moment je travaille sur un univers pour mes chimères numériques en 3D, que je puisse vraiment être immergé dedans, les animer et jouer. À terme j’aimerais développer un showroom immersif, pousser jusqu’au bout l’univers de mes collections, que ce soit une expérience sensationnelle qui ne soit pas figée.

Temple Magazine

Idéalement, c’est par cette plateforme numérique mise en place que tu souhaiterais présenter ta collection ? Par un ajout de couches immersives et interactives ?

Victor Clavelly

Oui, et en ce moment les showrooms numériques sont une des meilleures alternatives. La mode se montre numériquement ce qui remet en question notre façon de la créer et de la commercialiser.

Temple Magazine

Ce qui est intéressant dans ta collection c’est que ce choix d’un défilé numérique n’est pas fait par défaut suite à la crise sanitaire, c’est intrinsèque à ton processus de création.

Victor Clavelly

Cette année je prends le temps de finaliser ce projet d’univers plus global, je ne veux pas que ça entre dans le flux des viewing room qu’il y a actuellement. J’ai envie de m’éloigner de ces normes-là, de construire quelque chose de nouveau qui apporte dans cette mouvance.

Le choix des outils numériques est inhérent à ma pratique. En arrivant à Duperré, je ne savais pas construire des patrons de vêtements, la 3D m’a aidé à réaliser mes formes. Aujourd’hui en tant que jeune créateur j’ai du mal à me projeter dans un futur. À quoi je sers ? En utilisant ce type de procédé j’essaie de repenser la façon de faire du vêtement. Pendant mes stages dans de grandes entreprises j’ai halluciné en voyant le nombre de personne sur une collection, le temps nécessaire, le nombre de prototype. Tout est lent et ne me semble plus cohérent avec la manière de produire aujourd’hui. Le système archaïque et monarchique de certaines maisons de mode me sidère. Je n’arrive pas du tout à me projeter dans ce type de système.

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